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Vrai ou Faux

Transport - Informations professionnelles, Route
16/06/2020
 Le droit des transports de marchandises abordé à travers des Vrai ou Faux


Qualité de destinataire de la marchandise et signature de la case éponyme sur la lettre de voiture
La personne qui reçoit la marchandise, l’accepte et signe la lettre de voiture, en y émettant éventuellement des réserves, en est qualifié destinataire alors qu’elle ne figure pas sur la lettre de voiture en tant que tel, de sorte qu’elle devient, ce faisant, partie au contrat de transport. Vrai.
Aux termes d’une série d’arrêts rendus par la Cour de cassation, en 2008, le destinataire au contrat de transport est « celui qui reçoit [les transports litigieux de marchandises] et [les] accepte sans indiquer agir pour le compte d'un mandant » (Cass. com., 22 janv. 2008, n° 06-11.083, Bull. civ. IV, n° 13, BTL 2008, n° 3209, p. 67, 79 ; Cass. com., 22 janv. 2008, n° 06-15.957, Bull. civ. IV, n° 14, BTL 2008, n° 3209, p. 67, 78 ; Cass. com., 22 janv. 2008, n° 06-18.308, Bull. civ. IV, n° 15, BTL 2008, n° 3209, p. 67, 78 ; Cass. com., 22 janv. 2008, n° 06-19.423, Bull. civ. IV, n° 16, BTL 2008, p. 67, n° 3209, 79, Lamyline). Le contrat type « général » tait la condition émise par le juge du droit « sans indiquer agir pour le compte d’un mandant » et indique qu’il s’agit de « la partie désignée par le donneur d'ordre ou son représentant, à laquelle la livraison est faite » (contrat type « général », art. 2.2).

En tout état de cause, celui qui reçoit effectivement la marchandise – autrement dit le réceptionnaire – se retrouve en effet qualifié de destinataire de cette marchandise et se retrouve alors débiteur du prix du transport (C. com., art. L. 132-8). Il s’expose à une action directe en paiement, précieuse arme du voiturier (voir notamment l’article « Action directe : un coup de tampon : acte juridique consenti ? » par Laurence Henry et Edward Tierny, Avocats associés au Barreau de Marseille, BTL 2019, n° 3733, p. 211).
 

Transport international et délai de mise à disposition pour le chargement et le déchargement de la marchandise
Les parties à un contrat de transport international peuvent prévoir d'appliquer les délais de chargement et de déchargement fixés par les contrats type. Vrai.
La Convention de Genève de 1956, dite CMR, ne contient pas de dispositions relatives au chargement et au déchargement de la marchandises de sorte que les parties à un contrat de transport international de marchandises par route peuvent, effectivement, appliquer les délais fixés à ces sujets par les contrats type nationaux.
Ce délai de mise à disposition varie, selon le contrat type général, en fonction du poids de l'envoi (inférieur, égal ou supérieur à 3 tonnes, contrat type « général », art. 11).
 

Rupture brutale d’un contrat de sous-traitance établi et indemnisation
Le contrat type sous-traitance permet à la victime d’une rupture brutale du contrat de sous-traitance, par ailleurs informée de cette rupture par un courriel, d’obtenir une indemnisation de droit du préjudice subi. Faux.
En effet, le contrat type sous-traitance n’indemnise pas de plein droit la victime d’une rupture brutale des relations commerciales établies. À cette fin, la victime se doit de justifier la réalité ainsi que l’étendue de son préjudice (CA Dijon, 25 avr. 2019, n° 17/00930, Eurolia c/ Sté Medjebeur). En outre, s’agissant de la nécessité d’adresser une lettre recommandée informant de la rupture des relations commerciales, avec demande d’accusé de réception, bien que prévue expressément par le contrat type sous-traitance tant dans sa version de 2003 (art. 12.2) que celle de 2019 (art. 14.2 ; C. transp., art. D. 3224-3 ; D. n° 2019-695, 1er juill. 2019, BTL 2019, n° 3745, p. 415, Lamyline), ce recommandé n’est pas estimé nécessaire lorsque la victime est informée de la volonté de mettre fin à la relation contractuelle de manière claire, précise, non équivoque et suffisamment interpellatrice par un courriel. L’envoi de ce courriel vaut notification de la rupture de la relation de sous-traitance et ce d’autant plus que la partie se prétendant victime de la brutalité de ladite rupture, ne conteste pas avoir reçu le courriel. Il convient de rappeler que le contrat type est supplétif de volonté de sorte que les parties peuvent décider de procéder autrement que par lettre recommandée avec accusé de réception pour notifier la fin de leur relation contractuelle.
 

Chargement de la marchandise et obligations du transporteur routier
Le transporteur routier se doit de contrôler le chargement et la marchandise, au moment de l'enlèvement de cette dernière. Vrai et faux.
Vrai - Cette obligation est en effet édictée en transport routier international de marchandise (CMR, art. 8). Il incombe ainsi au transporteur de vérifier que les mentions de la lettre de voiture relatives au nombre de colis, à leurs marques et numéros sont exactes. Le transporteur doit, par ailleurs, examiner l'état apparent de la marchandise et celui de son emballage. Lorsque le transporteur ne dispose pas des moyens raisonnables pour procéder à ces vérifications, il mentionne sur la lettre de voiture des réserves qu'il doit motiver. En l’absence de telles réserves, le transporteur ne pourra pas invoquer plus tard ce moyen d'exonération. L'expéditeur qui accepte de manière expresse ces réserves, sur la lettre de voiture, s'engage.
Faux - En transport routier national, le transporteur est seulement tenu  de procéder à une reconnaissance extérieure du chargement. Pour ce faire, dans la pratique, le conducteur jette un coup d'œil sur ce qui est apparent avant le bâchage et la fermeture des portes. Un défaut apparent sera porté en réserve au chargement et aidera le transporteur à s'exonérer de sa responsabilité. L'acceptation de la réserve par l'expéditeur – le donneur d’ordre des contrats types –, qui n’est pas nécessairement le remettant de la marchandise ou celui chez qui la marchandise est enlevée (Cass. com, 13 févr. 2007, n° 05-18.590, BTL 2007, p. 119 ; CA Montpellier, 11 mars 2003, n° 00/04294, Citral c/ Hendrickson Europe, BTL 2003, p. 273, Lamyline : lieu d'enlèvement chez un réparateur), n'est pas requise. Sa seule indication sur la lettre de voiture suffit à l'opposer à l'expéditeur. Lorsque le défaut n'est pas apparent, le transporteur qui n'a pas pu émettre de réserve (et pour cause) a la possibilité de tenter de démontrer ultérieurement que le préjudice constaté lors de la livraison résulte d'un mauvais chargement.
 

Droit de rétention du commissionnaire de transport et procédure collective
La régularité de l'exercice du droit de rétention du commissionnaire de transport s'apprécie à la date de la remise effective des marchandises. Par voie de conséquence, ce droit n’est pas régulièrement exercé lorsque les marchandises sont réellement confiées au commissionnaire au lendemain de l’ouverture d’une procédure collective de son client, pour obtenir le paiement de créances antérieures. Faux.
La jurisprudence considère en effet que la régularité de l'exercice du droit de rétention – sûreté réelle et non un privilège et opposable à une procédure collective (Cass. com., 21 mars 2006, n° 04-19.794 ; Cass. com., 30 oct. 2012, n° 11-23.636 ; C. civ., art. 2286) – s'apprécie à la date du contrat de transport des marchandises et non à la date de la remise effective de ces dernières au commissionnaire, laquelle peut être postérieure à la conclusion du contrat de transport et à l’ouverture d’une procédure collective. Le commissionnaire ne peut exercer son droit de rétention que sur des marchandises qui ont fait l’objet d’un contrat de transport conclu avant le jugement d'ouverture d’une procédure collective. Aussi, le commissionnaire ne peut obtenir le paiement de sa créance, qui est donc antérieure à ce jugement, qu’à la condition que le juge-commissaire autorise le débiteur de cette créance à s’en acquitter pour permettre la poursuite de son activité (C. com., art. L. 621-24 qui interdit le paiement des créances antérieures; C. com., art. L. 642-12 relatif à l’autorisation de paiement du juge-commissaire) (CA Versailles, 12e ch., 30 janv. 2020, n° 18/08231, DSV Air & Sea c/ Plombelec Colliers et fixations, BTL 2020, n° 3772, p. 91, Lamyline).
Source : Actualités du droit