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Contrats de service public de transport ferroviaire : les modalités d’attribution directe déjà adoptées pour fin 2023

Public - Droit public des affaires
22/07/2020
Un décret publié au Journal officiel du 17 juin 2020 précise les modalités selon lesquelles les autorités organisatrices de transport (AOT) pourront déroger à l’obligation de mise en concurrence en attribuant directement des contrats de service public de transport ferroviaire de voyageurs. Ces dispositions n’entreront en vigueur qu’à compter du 25 décembre 2023, à la fin de la période transitoire actuelle.
Pour rappel, depuis le 3 décembre 2019, conformément aux articles 18 et 19 de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire (L. n° 2018-515, 27 juin 2018, JO 28 juin), les autorités organisatrices de transport (AOT) peuvent mettre en concurrence l’exploitation des services conventionnés de transport ferroviaire de voyageurs. À compter du 25 décembre 2023, cette possibilité deviendra la règle avec l’entrée en vigueur de l’article L. 2121-15 du code des transports, qui pose le principe d’une publicité et mise en concurrence pour l’attribution de ces contrats. Des attributions directes resteront toutefois possibles, ainsi que l'article L. 2121-17 du même code (qui entrera en vigueur à la même date), dans des cas dérogatoires limitativement énumérées à l’article 5 du règlement (CE) n° 1370/2007 du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route.
 
Le décret du 15 juin 2020 précise les modalités pratiques de mise en œuvre de ces dérogations au principe d’appel d’offres en déterminant notamment les règles relatives à la forme des décisions des autorités organisatrices de recourir à l'attribution directe (dans les cas dérogatoires autorisés) ainsi que celles régissant l’intervention de l’ART.
 
Deux cas distincts
 
L'article L. 2121-17 du code des transports couvre deux procédures distinctes, reprenant certaines dérogations prévues par l’article 5 du règlement (CE) n° 1370/2007 précité.
 
Le premier cas concerne les attributions directes pour des services exploités par un opérateur gérant simultanément la totalité ou la majeure partie de l’infrastructure ferroviaire sur laquelle les services sont fournis dans le respect des conditions du paragraphe 4 ter de l’article 5 du règlement. Dans cette hypothèse, l’AOT pourra directement attribuer le contrat sans avis préalable de l’ART, mais toute personne à qui la décision est susceptible de faire grief peut demander à l'autorité de régulation d'évaluer, préalablement à l'attribution du contrat, la décision prise par l'AOT.
 
Le deuxième cas est celui prévu par l’article 5, paragraphes 3 bis et 4 bis, c’est-à-dire lorsque l’AOT considère que l'attribution directe est justifiée:
- soit par les caractéristiques structurelles et géographiques pertinentes du marché et du réseau concernés, ou lorsqu'un tel contrat aurait pour effet d'améliorer la qualité des services ou le rapport coût-efficacité (ou les deux) par rapport au précédent contrat attribué ;
- soit par des circonstances exceptionnelles énumérées au paragraphe 3 bis de l’article 5.
Ici, l’AOT ne pourra attribuer le contrat qu’après avis conforme de l’ART.
 
Formalisme des décisions d’attribution
 
Selon l’article 1er du décret, l’attribution directe sera soumise à une décision préalable de l'autorité organisatrice compétente, prenant la forme :
– pour les services de transport ferroviaire de voyageurs d'intérêt national (C. transp., art. L. 2121-1) : d'une décision motivée prise par le ministre chargé des transports et publiée au Bulletin officiel du ministère chargé des transports ;
– pour les autres services publics de transport ferroviaire de voyageurs : d'une délibération motivée et publiée de l'organe délibérant compétent de l’AOT.
 
En vertu de l’article 2, I, 1° du décret, dans les cas où l’ART n’est pas saisie d’une demande d’évaluation, l’AOT ne pourra attribuer le contrat qu’à l’expiration d’un délai de cinq semaines à compter de la publication de cette décision préalable.
 
Intervention de l’ART
 
L’article 2, II du décret précise que lorsqu’un tiers souhaite saisir l’ART d’une demande d’évaluation de la décision prise par l'AOT, il doit saisir l’autorité de régulation dans un délai d’un mois à compter de la publication de la décision préalable.
 
En cas de saisine, l’autorité de régulation en informe sans délai l’AOT et dispose d’un délai de deux mois à compter de la demande pour rendre son avis (article 2, III du décret).
 
Dans l’hypothèse d’une saisine par un tiers ou d’un avis rendu conformément aux paragraphes 3 bis et 4 bis précités, l’ART s’appuie, pour se prononcer, sur un dossier mis à sa disposition par l’AOT, justifiant de la conformité de sa décision préalable avec les conditions prévues par le règlement (CE) n° 1370/2007. Elle devra également établir et publier la méthode sur laquelle elle se fonde pour rendre son avis (article 4 du décret).
 
Si le dossier accompagnant la demande est reçu plus tardivement, le délai commence à courir à sa réception (article 2, III du décret). Si l'Autorité n'a pas rendu son avis à l'expiration de ce délai, cet avis est réputé conforme (article 3 du décret).
 
Enfin, l’article 4 du décret ajoute que le contenu de la demande d'évaluation et des dossiers précités devra être fixé par une décision de l’ART.
 
Ce décret, qui s'appliquera aux contrats attribués directement à compter du 25 décembre 2023, s’inscrit dans la lignée d’un précédent texte adopté en octobre dernier dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs (D. n° 2019-1083, 24 oct. 2019, JO 26 oct., lire Ouverture du rail à la concurrence : nouvelles dispositions réglementaires pour les TER, ADD, 30 oct. 2019).
Il est pris en application de l'article L. 2121-17 du code des transports, créé par l'article 14 de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire (L. n° 2018-515, 27 juin 2018, JO 28 juin, lire Le transport lancé sur une ligne concurrentielle à grande vitesse, Actualités du droit, 5 sept. 2018).
 
Pour aller plus loin
– Pour des développements détaillés sur la régulation des transports, voir Le Lamy Droit public des affaires 2020, nos 663 et suivants.
– Sur la mise en œuvre du nouveau pacte ferroviaire, voir les nos 670 et suivants.
– Plus précisément, sur les contrats de contrats de service public de transport ferroviaire, voir le n° 676.
Source : Actualités du droit