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Contrôle systématique par l'administration pénitentiaire de la correspondance d'un détenu avec son avocat : violation du droit à la vie privée retenue

Pénal - Procédure pénale
16/12/2016
La vérification physique systématique de la correspondance d'une détenue avec son avocat par l'administration pénitentiaire, en l'absence de garanties appropriées prévues par le droit interne contre les abus, n'est pas proportionnée aux buts légitimes poursuivis par l'ingérence (la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales) au droit de l'intéressée au respect de sa correspondance. Telle est la solution retenue par la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt rendu le 13 décembre 2016.
Dans cette affaire, la requérante, de nationalité turque, fonctionnaire à la direction des douanes, fut arrêtée dans le cadre d'une enquête de corruption. Elle fut reconnue coupable des infractions reprochées et condamnée à une peine d'emprisonnement de six ans et 15 jours. La requérante alléguait que sa correspondance avec son avocat portant sur sa requête devant la Cour avait été contrôlée par les autorités pénitentiaires et que cette pratique a porté atteinte à son droit au respect de sa correspondance.

Dans son arrêt, la Cour constate qu'un cachet de la commission de lecture de l'administration pénitentiaire figure sur la lettre datée du 11 juin 2007. Elle conclut que le contrôle effectué par l'administration pénitentiaire constituait une ingérence dans le droit de la requérante au respect de sa correspondance au sens de l'article 8 § 2 de la Convention. Le cachet apposé par la commission de lecture de l'administration pénitentiaire avec la mention "vu" se trouvant sur la lettre elle-même et non pas sur l'enveloppe, rien ne pouvait donc empêcher l'administration en question de lire le contenu de cette lettre. Par conséquent, la Cour considère que la mesure litigieuse, en l'espèce, n'était pas assortie de garanties adéquates et suffisantes. Elle juge donc, qu'en l'absence de garanties appropriées prévues par la législation interne contre les abus, la pratique ayant consisté en la vérification physique systématique de la correspondance de la requérante avec son avocat par l'administration pénitentiaire n'était pas proportionnée aux buts légitimes poursuivis. La Cour conclut donc à la violation de l'article 8 de la Convention.
Source : Actualités du droit