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Action en contestation d’une créance et action en paiement d’une somme formée contre le créancier : pas d’identité d’objet

Affaires - Commercial
16/10/2019
À la suite de l’ouverture d’une procédure collective, et en raison de créances réciproques, des actions s’entremêlent. La question de l’autorité de la chose jugée se pose.
L’autorité de la chose jugée est un effet propre à une décision juridictionnelle faisant entre autre obstacle à ce que la même affaire soit de nouveau portée devant un juge. Comme l’indique l’article 1355 du Code civil, un acte revêt l’autorité de la chose jugée à condition qu’une triple identité soit de mise : de parties, de cause et d’objet.  
 
En l’espèce, une société (société 1) fait l’objet d’une procédure de sauvegarde et bénéficie d’un plan arrêté. Une seconde société (société 2) lui réclame différents paiements après avoir tenu compte de compensations de créances, étant elle-même débitrice de certaines sommes. Un juge-commissaire près le tribunal de commerce de Montauban admet la société 2 au passif de la procédure collective de la société 1 à hauteur de 48 707,97 euros. Estimant qu’il n’y a pas lieu à compensation et contestant en outre sa propre créance, la société 1 assigne la société 2 en justice. Les juges du fond rejoignent la position de la société 1. Un pourvoi en cassation est formé.
 
La société 2 reproche en effet à la cour d’appel d’avoir rejeter la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée de l’ordonnance du juge-commissaire l’admettant au passif de la procédure collective. Selon les juges du fond, l’action en paiement n’a en effet pas le même objet que la demande formulée devant le juge-commissaire. La société 2 argue également que le principe de concentration des moyens n’a pas été respecté par la société 1 qui n’a pas formulé de demande en paiement durant l’instance de vérification du passif, point non relevé en appel. 
 
La Cour de cassation devait ainsi déterminer si une action contestant une créance au passif d’un débiteur soumis à une procédure collective ainsi qu’une demande en paiement d’une somme formée contre le créancier ont le même objet permettant, dès lors, d’opposer à la seconde demande l’autorité de la chose jugée de la première.
 
Dans un attendu détaillé, la Chambre commerciale énonce que « la déclaration d'une créance au passif d'un débiteur soumis à une procédure collective ne tend qu'à la constatation de l'existence, de la nature et du montant de la créance déclarée, appréciés au jour de l'ouverture de la procédure ; que la contestation de cette créance, au cours de la procédure de vérification du passif, n'a pas le même objet que la demande en paiement d'une somme d'argent formée contre le créancier déclarant ; qu'ayant relevé qu'à l'occasion de la contestation de la créance
de la (société 2), la (société 1) ne s'était pas prévalue de la compensation avec ses propres créances, ce qu'elle n'avait pas à faire, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande en paiement de celles-ci , qui ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée dans le cadre de la vérification des créances, était recevable ».
 
En l’absence d’identité d’objet, aucune autorité de la chose jugée ne peut être relevée. La demande en paiement est recevable.
 
La Cour de cassation précise en outre qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les autres moyens « qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ».
Source : Actualités du droit