Retour aux articles

Élections municipales : conformité des dispositions des I, III et IV de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 et de l’article L. 262 du code électoral

Public - Droit public général
01/07/2020
Dans deux décisions rendues le 17 juin 2020, le Conseil constitutionnel déclare conformes à la Constitution les dispositions des I, III et IV de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 et de l’article L. 262 du code électoral.
 
Par deux arrêts rendus le 25 mai 2020 (CE, 25 mai 2020, nos 440217 et 440335), le Conseil d’État a saisi le Conseil constitutionnel de deux questions prioritaires de constitutionnalité, relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions des I, III et IV de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 (v. Renvoi au Conseil constitutionnel de la question de la conformité à la Constitution des dispositions des I, III et IV de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, Actualités du droit, 27 mai 2020) et de l'article L. 262 du code électoral (v. L’article L. 262 du code électoral est-il conforme à la Constitution ?, Actualités du droit, 27 mai 2020).
 
Le report du second tour en juin
 
Les dispositions des I, III et IV de l’article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ont permis de reporter le second tour au 28 juin 2020 soit plus de trois mois après le premier tour des élections municipales (v. Le second tour des élections municipales aura (normalement) lieu le 28 juin 2020, Actualités du droit, 3 juin 2020). Or, selon les requérants, le législateur ne peut interrompre le processus électoral et aurait donc dû annuler les résultats du scrutin du 15 mars 2020 afin d’organiser de nouvelles élections. Au surplus, le scrutin à deux tours formant un bloc indissociable, le délai entre les deux tours apparaît excessif. Enfin, la tenue du second tour pendant la crise sanitaire peut engendrer une forte abstention et méconnaît ainsi les principes de sincérité du scrutin et d’égalité devant le suffrage.  
 
Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte du troisième alinéa de l’article 3 de la Constitution et de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 les principes de sincérité du scrutin et de l’égalité devant le suffrage.
 
Pour le Conseil constitutionnel, les dispositions contestées remettent en cause l’unité de déroulement des opérations. Toutefois, contrairement à une annulation du premier tour, elles permettent « de préserver l’expression du suffrage lors de celui-ci ». Par ailleurs, eu égard au contexte sanitaire, ces dispositions sont justifiées par un motif impérieux d’intérêt général. De plus, le délai maximal fixé entre les deux tours était adapté « à la gravité de la situation sanitaire et à l’incertitude entourant l’évolution de l’épidémie ». S’agissant des risques d’abstention, le second tour ne pouvait intervenir que si la situation sanitaire le permettait, les dispositions contestées ne favorisent pas ainsi par elles-mêmes l’abstention. Enfin, des mesures d’adaptation du droit électoral ont été prises afin d’assurer « la continuité des opérations électorales, l’égalité entre les candidats au cours de la campagne et la sincérité du scrutin ».
 
Dans ces conditions, le report du second tour des élections municipales ne méconnaît ainsi « ni le droit de suffrage, ni le principe de sincérité du scrutin, ni celui d’égalité devant le suffrage »
 
Les conséquences du report du second tour sur les mandats des conseillers municipaux et sur le contentieux de l’élection
 
Les requérants reprochent également aux dispositions des I, III et IV de l’article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 de fixer des dates d’entrée en fonction et des durées de mandat des conseillers municipaux différentes selon qu’ils ont été élus dès le premier tour ou qu’ils le seront à l’issue du second tour reporté.
 
Sur ce point, le Conseil constitutionnel reconnaît qu’il résulte des dispositions contestée une différence de durée de mandat entre les conseillers municipaux élus dès le premier tour et ceux élus à l’issue du second tour. Néanmoins, cette différence de traitement repose sur une différence de situation justifiée. Par ailleurs, dans les communes où un second tour est nécessaire, les dispositions contestées n’empêchent pas d’éventuelles contestations devant le juge de l’élection des opérations électorales du premier tour. Elles ne portent pas ainsi atteinte à la séparation des pouvoirs et au droit à un recours juridictionnel effectif. Ces dispositions sont conformes à la Constitution.
 
 
Pas de réexamen de la conformité de l’article L. 262 du code électoral 
 
Le renvoi de la question de la conformité à la Constitution des dispositions de l’article L. 262 du code électoral était justifié par le Conseil d’État compte tenu du « contexte inédit » dans lequel s’est déroulé le scrutin du 15 mars 2020 avec l’adoption de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, en particulier de ses articles 19 et 20.  En effet, le Conseil constitutionnel  a déjà déclaré cet article conforme à la Constitution dans deux décisions des 18 novembre 1982 (n° 82-146 DC) et 16 mai 2013 (n° 2013-667 DC).
 
Or, pour le Conseil constitutionnel, ce « contexte inédit » ne constitue pas un changement des circonstances justifiant un réexamen de la conformité de cet article à la Constitution. Il n’y a pas, dans ces conditions, lieu pour le Conseil constitutionnel d’examiner la question prioritaire de constitutionnalité.
 
 
 
Source : Actualités du droit